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Les réseaux sociaux, talon d’Achille de la stratégie des universités et des écoles

NB : cette tribune a été initialement publiée sur le site Newstank. Elle s’adossait à la publication du 1er « Index Facebook de l’enseignement supérieur » (accès réservé aux abonnés Newstank) co-réalisé par NewsTank, l’université de Perpignan et Canévet et associés. 


 

Inversement proportionnelle à l’attention et à la médiatisation du numérique dans l’enseignement supérieur, la présence des universités et des écoles sur les réseaux sociaux est le révélateur de leurs lacunes stratégiques. Mais les remèdes existent.

Tout juste 1 million de fans cumulés

Mooc, Edtech , Open-data, Idefi-N… Il y a d’un côté le numérique dont on parle beaucoup dans l’actualité de l’enseignement supérieur, à coups de projets à plusieurs millions d’euros, d’affichage d’ambitions, de grandes déclarations d’intentions et de l’autre, la réalité terrain quotidienne, qui se mesure notamment à l’aune de l’audience et de l’activité de ces mêmes établissements sur les réseaux sociaux.

Alors que, années après années le “social media” représente une part croissante des dépenses pour les autres « industries » et “services”, quelques écoles mais finalement très peu d’universités ont revu leur modèle d’investissement publicitaire. Je ne parle pas d’être « précurseur » mais simplement d’utiliser les plateformes qui ont fait leurs preuves en terme de ciblage (Facebook, Twitter, Instagram…).

Alors que Facebook a été créé en 2004 sur le campus d’Harvard, 10 ans après, les pages des universités françaises viennent tout juste d’atteindre le million de fans cumulés. Or prendre son temps n’est plus une option. La pratique des réseaux sociaux pour les établissements d’enseignement supérieur ne peut plus être amateure. Nous entrons dans l’aire de la professionnalisation. Les établissements doivent accélérer.

Retard de moyens et de contenus

Universités et écoles souffrent aujourd’hui d’un retard en terme de moyens (postes de community manager, achat d’outils, de publicités) et d’un retard en terme de contenus.

Il y a de l’argent pour produire des Mooc dont on ne sait (pour le moment) ce qu’ils apportent à l’établissement (ni d’ailleurs vraiment aux étudiants) mais il n’y en a pas pour toucher ses prospects sur les réseaux sociaux.

Si le temps et l’argent sont deux conditions nécessaires de la réussite de la présence des établissements sur les réseaux sociaux, ce ne sont pas des conditions suffisantes. Il suffit de suivre le fil Twitter d’une école ou la page Facebook d’une université pour comprendre que leur actualité est riche et variée. Pour autant comprend-on qui ils sont ? Quelles sont leurs spécialités, leurs différences ? Sans stratégie, sans l’affirmation d’un projet et sa déclinaison en plan d’action, point de salut.

Mooc, e-portfolio… sont des leurres sur la façon dont s’effectue, en réalité, la transformation numérique de l’université. Les vrais innovations et avancées sont ailleurs, dans des pratiques et des expérimentations beaucoup moins médiatisées : ces enseignants qui utilisent Twitter pour interagir avant et pendant un cours, ces (rares) établissements qui se sont dotés de CRM, ces étudiants qui organisent la vie de leur résidence grâce à un groupe Facebook, etc.

L’outil précède la stratégie

Nous ne renions pas le droit à l’expérimentation, mais depuis trop longtemps dans l’ESR l’outil a précédé la stratégie. Des personnels motivés et brillants conçoivent de toute pièce un service numérique, sans étude d’usages, sur commande ou en s’auto-saisissant au prix de centaines d’heures de travail : cela aboutit à un service qui n’a pas été sollicité par les usagers et à qui il ne sera donc jamais rendu justice.

Si l’alchimie ne prend pas c’est qu’il manque deux ingrédients dans la formule : une solide étude préalable d’usage et de besoins et l’appartenance de cette brique de service à un plan d’ensemble (la stratégie de l’établissement). Condition sine qua non de son évaluation et de sa réussite.

Combien de messageries électroniques d’établissements délaissées par étudiants et personnels ? Combien d’intranet et d’ENT désertés ? Écoute et analytics sont à l’inverse les 2 piliers incontournables d’une présence efficiente sur les réseaux sociaux.

Les réseaux sociaux modifient la relation à la marque

Ce désintérêt des établissements pour les réseaux sociaux est mortifère car proposer des services efficients et qui collent aux besoins, c’est le point fort de toutes ces entreprises privées qui sont en train de s’intéresser au secteur de la formation supérieure.

Les réseaux sociaux ne sont pas un simple tuyau de plus pour arroser les cibles de l’actualité de l’établissement, c’est un outil qui change les attentes de l’usager et qui modifie sa relation à la marque :

  • parce que son attention y est morcelée,
  • parce que son expérience y est personnalisée,
  • parce que son rapport au temps se tourne vers l’immédiateté.

Et ces changements dépassent le cadre de la page web ou du smartphone. On entre en contact avec son établissement sur Facebook messenger, on se plaint ou on s’informe sur Twitter, on affiche son appartenance sur Instagram….

Le service communication est donc loin d’être le seul concerné par les changements à l’oeuvre. In fine, les réseaux sociaux sont le media par lequel beaucoup d’établissements découvrent à la fois la notion de relation à l’usager, de service public et de marketing.

Les raisons d’espérer

Certes cela fait beaucoup d’enjeux, mais pour les universités et les écoles, la situation n’est pas désespérée.

  • Parce qu’elles produisent beaucoup de contenu
  • Parce qu’elles (malgré elles souvent) sont des lieux qui marquent des parcours de vie et qui de fait suscitent de l’attachement.

Autant de points clefs pour affirmer sa présence sur les réseaux sociaux.

Comparativement à d’autres marques, les établissements partent donc avec de sérieux atouts. Ils doivent maintenant faire face à leurs faiblesses. Pour cela, il leur faut :

  • Développer l’écoute de leurs usagers et communautés. Les réseaux sociaux sont un formidable outil pour cela.
  • Améliorer le service rendu : en s’interrogeant sur leurs process, la façon d’entrer en contact et de satisfaire l’usager. Les réseaux sociaux sont un formidable outil pour cela.
  • Professionnaliser leur communication en y développant du marketing : arrêter une stratégie, se fixer des objectifs, investir à bon escient, mesurer les retombées. Les réseaux sociaux sont un formidable outil pour cela.

Par où commencer ?

Il est urgent d’acculturer les directions : ateliers, masterclass, suivi des pratiques individuelles. L’idée n’est bien évidemment pas de les transformer en professionnel de la communication numérique mais de leur permettre de posséder les bases du dialogue avec les spécialistes pour être plus efficient dans la façon de connecter projet d’établissement, stratégie et communication numérique.

Mettre fin à la culture du silo des services d’appui et de soutien : construire des équipes pluridisciplinaires sur les enjeux de communication numérique ou à tout le moins identifier dans chaque service un interlocuteur clef pour le service communication (et inversement).

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